17 avril 2025 | Formation, GPclimat
Du nouveau dans notre association après l'Assemblée générale
Finissons-en avec la publicité nocive au climat !
Ainsi fonctionne le « greenwashing »…
Éditorial
Présidée par Jean-Yves Pidoux, co-président sortant, l'assemblée générale de 2025 s'est déroulée le 12 mars à Berne. 53 membres étaient accueillis par le groupe Berne Ville, organisateur de la journée, que le comité remercie vivement. L'assemblée a approuvé tous les points de la partie statutaire, voir le PV ICI. À la suite d'une demande du groupe de Lausanne et environs de mieux bénéficier des cotisations, le comité a présenté les grandes lignes d'une nouvelle méthode d'allocation des ressources aux groupes. Une initiative visant à augmenter successivement la part attribuée aux groupes et à diminuer celle de l'association nationale a également été discutée. Ces thèmes seront à l'agenda de la coordination nationale du 23 septembre. Jean-Yves Pidoux nous avait déjà annoncé sa démission du comité. Nous lui sommes extrêmement reconnaissants de son investissement en tant que co-président et lui adressons un grand merci pour ses deux ans de présidence. Nous sommes heureux qu'il poursuive son engagement pour les Grands-parents pour le climat dans le cadre de la Commission scientifique. Nous remercions également Brigitte Guex, passerelle entre le comité et le projet « alimentation ». L'après-midi était en large partie consacré à des présentations des très nombreuses activités des groupes et sections régionaux et cantonaux, de la Commission scientifique et du GT-politique. Le groupe JYBE, en s'associant à la révolte des scientifiques, a lancé un appel voir ICI à la suite des décisions prises et à la violence des propos tenus par l'administration Trump. L'AG a approuvé la résolution et chargé le comité de rédiger un communiqué de presse. Le comité, dont deux nouveaux membres, va poursuivre la réflexion stratégique déjà entamée. Pour conclure la journée, les Grands-parents, munis de gilets et de banderoles, se sont rendus à la Place de la gare de Berne pour y tenir une veille publique.
Pour le comité national : Eva Affoter-Svenonius
OK Climat, un projet de l’Alliance climatique qui vous permet de vous engager dans votre commune : pour que la Suisse atteigne un bilan zéro carbone, le niveau local est fondamental. OK Climat aide les mouvements locaux à exiger de leur commune et de leur canton des mesures ciblées. Le projet a été lancé par l’Alliance climatique en collaboration avec l’Alliance digitale afin de créer plus de transparence sur ce que les communes et les cantons font pour le climat et où il faut agir. Cette approche a été présentée ces dernières semaines lors du tour de Suisse d’OK Climat ; de nombreux membres des Grands-parents pour le climat y ont participé. Sur la plateforme OK Climat, qui sera publiée en mai, les personnes et les groupements engagés localement pourront à l’avenir voir quelle est la situation dans leur lieu de résidence et comment ils peuvent s’engager. Pour les aider, nous développons actuellement une boîte d’action avec des instructions concrètes, des formats d’ateliers et des possibilités de mise en réseau. Si vous souhaitez vous engager dans votre commune pour une politique climatique ambitieuse, vous pouvez d'abord vous inscrire en tant que « personnes de contact » locales, afin que nous puissions vous mentionner sur la plate-forme pour votre commune et montrer que quelque chose se passe déjà dans cette commune. Ensuite, vous pouvez partager avec nous des actions politiques concrètes qui changent les conditions-cadres sur place, afin que nous puissions les soutenir et, en cas de succès, les diffuser et les reproduire. Et vous tenir au courant, par le biais de notre newsletter, des possibilités concrètes où vous pouvez vous impliquer et / ou vous mettre en réseau. Informations sur https://www.ok-klima.ch/fr/ ou nous contacter via hello@ok-klima.ch.
Rahel Aschwanden, Alliance climatique suisse
Un an après l'arrêt historique de la Cour européenne des droits humains, la pierre de Strasbourg le commémore : le 9 avril 2024, l'arrêt de la CEDH a donné raison aux Aînées pour le climat et condamné la Suisse pour inaction climatique. Qualifié d'historique, ce verdict a fait couler beaucoup d'encre. Il est appelé à faire jurisprudence dans les quarante-six États membres du Conseil de l'Europe et inspire de nouvelles requêtes, y compris hors des frontières de l'Europe. Une ancienne juge de la CEDH et professeure de droit international, Hellen Keller, considère dans la NZZ que l'arrêt est révolutionnaire pour le droit climatique, les droits humains, ainsi que pour la position des organisations de droit environnemental. En Suisse au contraire, le parlement et le Conseil Fédéral se sont ridiculisés en déclarant qu'ils font déjà tout juste pour le climat et en repoussant les conclusions de la CEDH… Et nous voici une année plus tard, le 9 avril 2025, sur la place fédérale ; les Aînées, dans la bonne humeur, ont fait déposer un pavé dans la mare de nos élu.e.s…une pierre cubique de 2,5 tonnes, acheminée depuis Strasbourg en tracteur électrique… Une pierre suisse sera offerte à Strasbourg et posée sur le chemin de la CEDH. Environ deux cents personnes, dont les GPclimat, entourent les Aînées. Les deux co-présidentes Anne Mahrer et Rosmarie Wydler-Wälti accompagnées du comité et de l’expert climatique Georg Klingler de Greenpeace savourent ce moment, espérant qu'il fera bouger les lignes en Suisse aussi… Soleil radieux, prises de parole, musique, chants. Un livre, écrit par un journaliste de La Liberté, Sevan Pearson retrace toute leur aventure : « Le long combat des Aînées pour le climat » aux éditions Savoir Suisse. Un film, « Trop chaud » est sorti ce 9 avril et sera diffusé en Suisse allemande dès mai et en Suisse romande dès juin 2025.Quelle belle journée ! Ce n'est pas notre dernière rencontre, car « On continue »…
Laurence Martin
Comment rester serein face aux crises ?
Les grands-parents pour le climat d’Echandens et environs (dans la région de Morges) organisent depuis plusieurs années, avec le soutien de la commune, une conférence à laquelle ils invitent leurs concitoyen.nes. Ainsi l’ingénieur forestier bien connu et engagé Ernst Zuercher, qui a fait connaître des phénomènes de communication entre végétaux, les arbres notamment ; le vigneron actif en biodynamie Raoul Cruchon ; l’écrivain Blaise Hofmann, auteur de “Faire paysan”, livre qui a fait mieux comprendre les agriculteurs, leurs difficultés et les efforts qu’ils déploient dans un sens plus durable ; et aussi des témoignages et films sur des initiatives pratiques de transition, chez nous, par exemple jardins et magasins participatifs. A la fin janvier 2025, notre conférencière était Sarah Koller, docteure en sciences de l’environnement et praticienne en écopsychologie. Elle a exploré des pistes pour garder sa sérénité face aux changements sociétaux et aux indispensables transitions écologiques. Elle nous dit : “ressentir des émotions comme l’éco-anxiété, c’est sain: c’est faire faire preuve de lucidité, ce n’est pas morbide. Beaucoup de personnes ont de tels sentiments. Le fait de s’entourer, d’en parler, peut être un réflexe salvateur”. “Il est bon de vider régulièrement le trop-plein d’émotions; prendre du temps pour se ressourcer nourrit aussi la transition”. Cela vaut pour la promenade en forêt ou en montagne, jardiner … ” et d'ailleurs, un jardin communautaire a été créé dans notre village il y a trois ans dont plusieurs GPC sont des animateurs. Dans sa conclusion, Sarah invite à cultiver la joie et à vivre pleinement le moment présent, à en profiter. “Il ne s’agit pas de porter seul le poids du changement. Ne pas se laisser happer par l’urgence, se rappeler qu’on est dans un marathon autant que dans un sprint”.
Jean Martin
Nous pouvons faire interdire les publicités pour des produits néfastes au climat
Avez-vous 190'000 CHF…. ?…. avec lesquels vous pourriez remplir pendant trois mois tout un tram de publicité extérieure et intérieure, par exemple pour des compagnies aériennes à bas prix, pour des crypto-monnaies gourmandes en énergie ou pour des voyages de vacances TUI outre-mer ! Tout cela a déjà été fait. Le responsable de cette publicité, le directeur du département Services industriels de la ville de Zurich, élu PLR, ne semble pas s’en soucier. La ville a pourtant des objectifs climatiques ambitieux, pour lesquels elle fait beaucoup, même si ce n’est pas avec la dernière rigueur, comme on le voit… Ainsi, il sera difficile d’atteindre la neutralité carbone en 2040 (pour les émissions directes). Il en va de même dans de nombreuses autres villes, raison pour laquelle il existe déjà des interdictions de publicité pour les produits nuisibles au climat : Amsterdam et Edimbourg (mais sans l’aviation), Haarlem pour les produits carnés et La Haye au 1er janvier 2025, là pour les carburants fossiles, y compris les voitures à essence et le trafic aérien. A Genève, une interdiction similaire a malheureusement été rejetée de justesse par les électeurs en 2024. Mais la commune de Vernier a interdit en 2022 toute publicité sur le domaine public et sur les terrains privés visibles de l’extérieur. Le Tribunal fédéral a rejeté des plaintes à ce sujet au milieu de l’année 2024 et a nié toute violation de la liberté du commerce et de l’industrie et du droit à la liberté d’expression. (Arrêt du 5 juin 2024 2C_36/2023, 2C_38/2023). La publicité pour la culture et le sport ainsi que la publicité pour les votations et les élections restent autorisées.
Une interdiction similaire pourrait désormais s’appliquer à Berne. Le 19 mars 2025, le parlement de la ville de Zurich a adopté une proposition d’interdiction comme à Vernier par 58 voix contre 57, mais uniquement pour le domaine public. Le gouvernement de la ville s’y est opposé, mais doit maintenant élaborer une proposition. Les conseils de Genève pour la votation populaire sont les bienvenus ! Peut-être ces exemples vous encourageront- ils, chers grands-parents pour le climat, à mettre en discussion dans d’autres villes et peut-être même villages une interdiction de la publicité, ne serait-ce que pour des produits clairement nuisibles au climat ? On vous en remercie !
Gondini Ragaz
Non au greenwashing à la Tour des Cèdres, aberration écologique !
Au printemps 2024, à Chavannes près Renens (VD), le projet de la Tour des Cèdres a été mis à l'enquête publique pour construire une tour de 40 étages. Ce projet est une aberration écologique, cette tour prévoyant de planter de grands arbres en façade, nécessitant un besoin excessif de béton et un arrosage permanent pour des raisons de sécurité incendie.
Dans les faits, ce projet présenté comme une merveille écologique, en raison de son apparence verte, est avant tout un projet d’investissement spéculatif, fondé sur le Greenwashing.
Objectif de haute qualité environnementale du plan de quartier bafoué !!
Energie grise : le projet ne respecte pas le standard visé. Pire, pour supporter des arbres majeurs, la structure en béton doit être exagérément agrandie générant plus d'émissions de CO2 à la construction que ne peuvent absorber 20’000 arbres en 60 ans ! Besoin en eau : pour respecter les normes incendie, le projet nécessite un arrosage en continu des arbres « verticaux ». Cela signifie qu’en cas de restriction d’eau pour les citoyens de la commune les habitants de la Tour seront privilégiés. Ainsi, pour rendre viable cette forêt verticale, la municipalité a déjà accordé une dérogation !
Mobilité du plan de quartier pas respectée !
Les auteurs du projet prétendent ne pas avoir besoin de places de parc, obtenant ainsi une autre dérogation de la municipalité ! Pur mensonge, le projet mis à l'enquête prévoyant un sous-sol de 2 niveaux intitulé « dépôt », facilement modifiable en parking par une demande de changement d'affectation non soumis à enquête publique.
Chavannes-Renens : commune touristique, vraiment ?
Le statut de Commune touristique obtenu du Conseil d'Etat permet d'envisager de vendre des appartements à des étrangers favorisant ainsi la spéculation induisant une augmentation généralisée des loyers. Des appartements luxueux, avec piscine sur le toit, ne correspondent pas aux besoins de la population de la région, plutôt composée d’ouvriers, d’étudiants de l’UNIL, de l’EPFL et d’employés.
Yves Golay-Fleurdelys, architecte, expert en durabilité, membre GPC
Samedi 24 mai, des actions des grands-parents pour le climat auront lieu dans toute la Suisse à l’occasion du jour du Dépassement (Overshoot-Day) 2025. Le slogan de cette année est : « Mieux vivre sans gaspillage ». Notre action sera introduite par un communiqué de presse le 7 mai. Outre des arguments et des informations, nous dénoncerons l’incroyable gaspillage et récolterons des signatures pour les initiatives sur la place financière et sur l’énergie solaire. Pour rappel, la consommation annuelle de ressources en Suisse est 3 fois plus élevée que ce à quoi nous avons droit ! Merci de faire de la publicité pour nos actions. Parlez-en à vos amis et à vos connaissances et utilisez les médias sociaux. « Liker » les messages et bien d’autres actions contribuent à nous faire connaître auprès des jeunes et des moins jeunes. Les événements régionaux peuvent être consultés sur https://www.gpclimat.ch/groupes-regionaux/.L’image de marque est uniforme et bilingue. Les actions sont individuelles et adaptées aux régions. La devise mentionnée ci-dessus est la même pour tou·s·tes.Nous remercions ici tous les participant·e·s qui rendent cette action possible.
Pour le groupe de préparation, Manfred Knausz
La commission scientifique se renouvelle
La commission scientifique des GPC est composée de personnes dont l'horizon est très divers : climatologie bien sûr, mais aussi (dans l'ordre alphabétique pour éviter de suggérer des priorités) architecture, biologie et biophysique, chimie, droit, économie, médecine, physique, sociologie. Cette commission peut donc faire valoir une masse de connaissances et un authentique potentiel interdisciplinaire. Son histoire est aussi longue que celle de notre association. Présidée par feu Jean-Denis Bourquin, puis Nicole Galland et dernièrement Jean-Claude Keller, elle se targue de belles réussites, avec des conférences organisées de concert avec des universités romandes. Jean-Claude Keller ayant souhaité passer la main, je reprends l'animation de cette commission. J'ai pu échanger avec lui et avec d'autres membres, qui m'ont toutes et tous réservé bon accueil. Je leur en suis reconnaissant. De ces discussions émane le constat que la Commission scientifique a œuvré avec succès en organisant ces conférences. Le principe devrait être maintenu, mais en étendant le périmètre des universités partenaires vers la Suisse allemande, ce qui évidemment nécessite que nous établissions de nouveaux liens : nous remercions donc celles et ceux de nos membres qui sont en relation avec une université alémanique de nous faire profiter de leurs réseaux. De plus, nous souhaitons diversifier les relations avec les membres de notre association : les conférences sont des moments intenses, mais restent ponctuelles, temporellement et spatialement. Nous avons donc l'intention de nous adresser à l'ensemble d'entre vous par l'intermédiaire de ce bulletin. Nous commencerons, dès le prochain numéro, par le rappel de connaissances de base en matière climatique – nous supposons que ces rappels peuvent être utiles. Mais nous souhaitons surtout répondre à vos besoins et à ceux du comité. Nous pourrons ainsi savoir quels thèmes approfondir. Bienvenue donc dans notre FAQ (« Foire aux questions ») scientifique : écrivez-nous par l'intermédiaire de notre secrétariat !
Jean-Yves Pidoux
Des nouvelles des Grands-parents européens
Le congrès annuel des grands-parents du climat européens (GP-Europe) aura lieu du 28 au 31 août à Oslo. Isabelle Jörg des Aînées pour le climat Suisse ainsi qu’Eva Affolter-Svenonius et moi-même de GPC Suisse y participeront. Un groupe de travail a été créé pour préparer le 10e anniversaire de l’accord de Paris sur le climat. Je participe à celui-ci. Le groupe de travail de GP-Europe « communication avec le public » mise sur des récits personnels, des podcasts humoristiques, émotionnels et courts, produits dans les différents pays et diffusés sur différents canaux comme YouTube ou Tik-Tok.
Jakob Huber, membre du comité
Le 30 km/h en ville est en danger
Pendant longtemps, l’introduction de la vitesse à 30 km/h dans les villes a été combattue par l’ACS et le TCS, principalement sur le plan juridique. Le Tribunal fédéral a cependant confirmé dans de nombreux cas le bien-fondé de la limitation de vitesse à 30 km/h, souvent pour des raisons de protection contre le bruit, mais aussi en raison d’une sécurité routière accrue. Les opposants à la limitation de vitesse à 30 km/h agissent donc désormais principalement à deux niveaux : d’une part, ils prétendent que la vitesse à 30 km/h ralentit les transports publics, tram et bus, et les rend plus chers. Comme si ces transports publics leur tenaient à cœur ! D’autre part, des initiatives ont été déposées qui veulent limiter et retirer aux villes et aux communes le droit d’introduire une vitesse à 30 km/h dans les localités. De telles initiatives sont en suspens dans les cantons d’Argovie, Bâle-Campagne, Bâle-Ville, Berne, Fribourg, Vaud, Saint-Gall, Thurgovie, Zurich, Neuchâtel et Schaffhouse. Leur validité n’est toutefois pas toujours claire et leur traitement a parfois été reporté. A Genève justement, la généralisation des 30 km/h vient d'être refusée au moins pour un temps. La raison en est que le Parlement a transmis en 2024 une motion du PLR/UDC au Conseil fédéral. Cette motion veut modifier la loi nationale sur la circulation routière et rendre massivement plus difficile la limitation de vitesse à 30 km/h sur les routes dites “à orientation trafic”. La vitesse de 30 km/h ne pourrait plus être introduite sur l’ensemble du territoire, ni par exemple là où le BPA (Bureau de prévention des accidents) l’exige : « La vitesse à 30 km/h doit être maintenue en localité partout où la sécurité routière l’exige, donc également sur des tronçons de routes à orientation trafic, par exemple lorsque celles-ci sont densément construites des deux côtés et que de nombreux cyclistes et piétons y circulent ». Veuillez donc signer la pétition de l’ATE « NON à l’interdiction de rouler à 30 km/h dans les localités ! ».
Merci !
Gondini Ragaz
Agenda
24.05.2025 OSD – Journée du Dépassement : action des groupes régionaux dans toute la Suisse.
Et voyez sur notre site les agendas locaux de nos quinze groupes régionaux : il y a de quoi faire !
«Normose»: quand le normal est problématique…et cela concerne aussi le réchauffement climatique
Maladie de la normalité, la notion de « normose » est contre-intuitive. Pourtant la réalité de comportements qualifiés de normaux, alors qu'ils peuvent se révéler problématiques, a été relevée par plusieurs penseurs : Ronald D. Laing, C. G Jung, Pierre Weil, Jean-Yves Leloup, Roberto Crema, Ferdinand Wulliemier. La « normose » fait référence à des attitudes et des comportements qui sont valorisés par la société, alors même qu'ils se révèlent pathologiques.
Qu'est-ce que la « normose » ?
Il est considéré comme normal de se soumettre aux règles et aux normes de la société, ainsi qu'aux injonctions des autorités. Pourtant il peut y avoir des situations où ce qu'on qualifie de normal nous apparaisse déraisonnable ou heurte même notre conscience morale. Le soldat, qui refuse de tuer un ennemi sur le champ de bataille parce que sa conscience le lui interdit n'agit pas de manière normale et il suscite souvent plus d'indignation que l'individu violent et colérique qui en tue un autre dans une rixe. Les guerres sont considérées comme normales. Et bien qu'elles soient meurtrières et destructrices, elles sont observées de loin avec détachement par les gens normaux. L'attitude consistant à dire « non à la guerre », qualifiée de pacifisme, est plutôt mal considérée par les gens normaux. Et ne parlons pas du dérèglement climatique qui fait peser une épée de Damoclès sur la tête de nos petits-enfants. Nous avons vu après la décision de la CEDH du 9 avril 2024, que les politiciens « normaux » considèrent qu'il est normal de ne pas s'en émouvoir. Alors à quoi la notion de normalité fait elle référence ? La normalité statistique est utilisée en médecine pour identifier ce qui est pathologique, voire dangereux, donc justifiant d'être traité. Ainsi être en bonne santé, c'est juste être normal. Les choses sont moins simples en matière sociétale. Peut-on affirmer que, pour agir de manière juste ou avisée, il suffise de se conformer à la norme statistique ? On dit d'un phénomène qu'il est normal pour signifier qu'il est ordinaire, habituel, qu'il n'a rien d'exceptionnel. Mais on qualifie aussi de normal ce qui sert de modèle ou de référence. Et l'on tend souvent, mais ne serait-ce pas une erreur ? à dériver ce deuxième sens du premier, à considérer que ce qui est largement répandu, ce qui correspond à la moyenne statistique, est forcément satisfaisant, propre en ordre. La réalité de comportements qualifiés de normaux, alors qu'ils peuvent apparaître problématiques, a été relevée par plusieurs penseurs : le fondateur de la psychologie analytique Carl Gustave Jung, le psychologue Pierre Weil, le théologien et essayiste Jean-Yves Leloup ou encore le psychothérapeute brésilien Roberto Crema. Elle se trouve à l'origine de la notion de « normose », la maladie de la normalité. Selon Roberto Crema, la normose correspond à un ensemble de comportements, d'habitudes ou d'attitudes, qui sont valorisés par un large consensus social, alors même qu'ils se révèlent socialement pathologiques, voire pathogènes. Le « normosé » serait alors porteur d'une « maladie de la norme ». Il semble d'ailleurs que la grande majorité d'entre nous soyons normosés. Mais peu en ont conscience. Roberto Crema cite le psychiatre Ronald D. Laing, figure emblématique du mouvement dit « antipsychiatrique » qui avait fait parler de lui dans les années 1960 et 1970. Laing estimait que les individus normaux, et pas seulement les personnes souffrant de troubles psychiatriques, subissent une forme d'aliénation et donc seraient eux aussi atteints d'une forme de pathologie. C'est ainsi qu'il affirmait : « Ce que nous qualifions de “normal” est un condensé de répression, de déni, de scission, de projection, d’introjection et d’autres formes d’actions destructrices de l’expérience. Il s'agit d'un état radicalement étranger à la structure de l’être. Plus ceci nous est visible, plus il devient insensé de continuer avec des descriptions généralistes de “mécanismes“ supposés être spécifiquement schizoïdes, schizophrènes ou hystériques. Il existe des formes d’aliénation qui sont relativement étranges par rapport aux formes statistiquement “normales“ d’aliénation. La personne “normalement“ aliénée, en raison du fait qu’elle agit plus ou moins comme tout le monde, est considérée comme saine d’esprit. Ceux dont l'aliénation se trouve en décalage par rapport à l’état d’aliénation qui prévaut sont qualifiés de mauvais ou de fous par la majorité établie. »[1] L'aliénation que Laing dénonce dans cette citation relève d'une pression du corps social, les autres, qui entraîne la personne vers une inauthenticité dans ses rapports sociaux. Être authentique c'est parler et agir en « je », en accord avec sa conscience, être le véritable sujet de ses actes, plutôt que d'agir par mimétisme ou par soumission inconditionnelle à une autorité ou encore par crainte de la réprobation de ses pairs. Le fait de ne pas trouver en soi-même la source de ses choix, mais d'agir en fonction de l'idée, que l'on se fait de ce que des volontés extérieures exigent que l'on fasse, revient bien à ne pas agir en « je ». Être le sujet de ses actes, agir de manière autonome, constitue également la condition d'une conduite véritablement morale. En Suisse, le psychiatre Ferdinand Wulliemier a beaucoup travaillé sur le concept de normose. Pour lui la normose traduit un développement incomplet de l'être humain qui se manifeste par un ensemble de comportements, d'habitudes et d'attitudes repérables, associés à un sentiment de malaise ou « malheur ordinaire », le plus souvent marqué par des activités compensatoires utilisées pour faire diversion. En conséquence, le malaise n'est pas reconnu comme problématique ; il est généralement ignoré ou tout au plus considéré comme « normal ».
Michel Stevens
Notes :
On peut trouver un texte de Guillaume Ziegel consacré à la normose sur le site : https://metaphorm.fr/la-normose-partie1/
Robeto Crema a parlé de la normose dans le cadre d'une conférence TEDx : https://robertocrema.com.br/normose-pathologie-de-la-normalite-roberto-crema-tedx-lacador/
Le Dr Wulliemier a publié un livre sur le sujet : Ferdinand Wulliemier « La normose – Peut-on s’en libérer ? ». Éditions Recto-Verseau. Romont 2013
Et une BD de L. Thévoz et J.P. Gos : Alors, pourquoi on est riche?
Prochain Bulletin mi juin
Françoise Boris, René Jaccard, Gondini Ragaz

Quoi de neuf ? Bulletin N° 73 des Grands-parents pour le climat – janvier 2025
28 janvier 2025 | sur le mouvement, alliances | Formation, GPclimat

Quoi de neuf ? Bulletin N° 72 des Grands-parents pour le climat – novembre 2024
15 novembre 2024 | sur le mouvement, alliances | Formation, GPclimat
Flash Info – GPclimat : 10 ans, on continue!
12 septembre 2024 | action politique, à l'international, au niveau national | Alimentation, Formation, GPclimat

Quoi de neuf ? Bulletin N° 71 des Grands-parents pour le climat – septembre 2024
12 septembre 2024 | sur le mouvement, alliances | Formation, GPclimat
Flash Info – Consultation projet national
21 juillet 2024 | action politique, à l'international, au niveau national | Alimentation, Formation, GPclimat

Quoi de neuf ? Bulletin N° 70 des Grands-parents pour le climat – juin 2024
30 juin 2024 | sur le mouvement, alliances | Formation, GPclimat